Nous quittons Huahine avec mes parents pour la dernière escale de leur séjour avec nous : l’île de Taha’a. 3 îles en une dizaine de jours, c’est assez sportif, mais ils auront au moins un bel aperçu des différents charmes de la Polynésie française. Leur retour vers Tahiti se fera via l’aéroport de Raiatea, la grande île située dans le même lagon que Taha’a.
Aie, risque de collision en sortant du lagon de Huahine !
Depuis la baie d’Avea au sud, nous remontons le lagon par l’ouest et nous sortons par la passe Avapehi. Damien repère alors une grosse masse sombre à peine immergée. On pense d’abord à un tronc d’arbre mais on aperçoit rapidement un souffle juste à côté, c’est une baleine ! En fait, il s’agit d’une maman baleine et de son baleineau qui respire juste à côté d’elle.
Au début, on n’en mène pas large, nous sommes déjà engagés dans la passe et il s’agirait d’éviter les deux cétacés. On pense même à un problème chez la maman, on n’en a jamais vu dormir comme ça en se laissant flotter ! On s’éloigne des deux animaux, pour bifurquer de l’autre côté de la passe vers un bateau de plongée et leur demander conseil.
Mais l’un des moniteurs se met à nous hurler dessus dès qu’on s’approche, prétextant que c’est interdit de naviguer si près des baleines et d’aller nager avec elles dans les passes des lagons. Euh, ça, merci, on sait déjà ! On ne comptait pas se mettre à l’eau ! Il ajoute, toujours sur un ton agressif, qu’il faut les laisser tranquilles. On s’éloigne sans argumenter, laissant ces popa’a peu sympathiques entre eux.
On sait que les baleines rentrent dans les passes des lagons pour se protéger et se reposer, on l’a appris lors de notre excursion à Moorea. Mais là, on est juste resté surpris par cette baleine flottant entre deux eaux, sincèrement, on pensait que la maman avait un souci et que son baleineau restait à côté impuissant. Ce n’est pas apparemment par le cas, les deux se reposaient juste.
Note : Il est vrai qu’en voilier, il faut rester vigilant pendant la saison des baleines, surtout dans les entrées et sorties de passe.
Navigation jusqu’à Taha’a
Après cette rencontre inattendue, direction Taha’a, qui nous attend sagement à 22 milles juste en face. Les conditions extérieures sont calmes, comme lors de notre traversée nocturne entre Moorea et Huahine quelques jours auparavant. Une longue houle peu dérangeante et un vent faible, qui suffira néanmoins pour nous faire glisser sous voiles au moins 2 heures sur les 5 qu’il nous faut pour rejoindre l’île.
Nous entrons dans le double lagon de Raiatea-Taha’a par la passe Toahotu au nord-est. Sans difficulté particulière, cette passe se situe entre deux petites îles, le motu Ceran et le motu Atger.
Au fait, un double-lagon, c’est quoi ? |
Les deux îles de Raiatea et Taha’a sont situées dans un même lagon. Bien pratique en tant que voilier, car on n’a pas à ressortir sur l’océan pour passer d’une île à l’autre. Mais pourquoi ces deux îles sont-elles dans un lagon commun ? Nous avons déjà expliqué la formation des îles polynésiennes dans notre article «Arrivée sur l’île de Tahiti – Les aspects pratiques autour de la marina Taina». On pourrait penser que Raiatea et Taha’a sont si proches qu’elles devaient bien former une seule île à la base, à l’image de Tahiti et de sa presqu’île encore liées par un isthme. Une unique barrière se serait donc formée autour de l’île avant qu’elle se s’enfonce… Mais je ne suis pas sûre de cette information. J’ai lu autre part que ce sont bien deux îles différentes. Leur formation datent de la même période, entre 2,5 à 3,1 millions d’années pour Taha’a et entre 2,4 à 2,5 millions d’années pour Raiatea. En outre, comme elles sont situées à seulement 2,5 milles l’une de l’autre, cela aurait permis à une unique barrière de corail de se former tout autour. Cela pourrait expliquer qu’elles soient tout de même séparées par de larges bandes de coraux au milieu du lagon (pas une barrière à proprement dit, plus des platiers), qu’on peut traverser via un chenal balisé. |
Tour de la petite île par le nord
Taha’a est réputée pour être une île calme, paisible, dédiée à la culture de la vanille. De nombreuses plantations y sont implantées et les précieuses gousses sont vendues à prix d’or dans toutes la Polynésie française, censées être les meilleures du marché. Surnommée « l’île vanille », on y sentirait les douces effluves dès son approche. Bon, c’est bien joli tout ça, mais on n’a pas vraiment remarqué d’odeurs agréables particulières en naviguant autour de l’île…;)
On peut faire le tour de Taha’a sans souci en voilier car son lagon est suffisamment profond. Ce qui n’est pas le cas de Raiatea, où les coraux remontent à certains endroits autour de l’île.
En avançant sur l’eau plate au moteur, on prend le temps de découvrir la côte assez sauvage de la petite île, parsemée de petits villages mais préservée d’infrastructures hôtelières. On peut encore apercevoir avec plaisir vers l’ouest, au-delà du lagon, l’île de Huahine qu’on vient tout juste de quitter. Puis vers l’est, c’est la mythique île de Bora Bora qui se dévoile et dessine son sommet si reconnaissable sur le ciel bleu.
On comprend mieux pourquoi ce lagon est plébiscité par les guides touristiques pour les croisières à la voile. Un panorama sur quasiment toutes les Îles sous le Vent en même temps, c’est vraiment extraordinaire ! Il faut avouer que ce double-lagon est un vaste terrain de jeu. On peut même réussir à s’y faire plaisir à la voile, surtout au milieu entre les deux îles, où on peut s’amuser à tirer des bords entre les platiers de coraux.
Les Îles sous le Vent, dans l’archipel de la Société |
Dernières à l’ouest de la Polynésie française, les Îles sous le Vent s’étendent d’est et en ouest, séparées les unes des autres par un peu plus d’une vingtaine de milles. Bien qu’éloignés des Îles du Vent (Tahiti, Moorea, etc.) d’environ 80 milles au plus court, elles se situent dans le même alignement volcanique. Elles sont connues grâce à Bora Bora, la « perle du Pacifique », qui joue un rôle essentiel dans le tourisme international, surtout celui de luxe lié au lunes de miel. Mais il n’y a pas que Bora Bora qui en vaille la peine, bien au contraire ! Personnellement, nous avons adoré la tranquille Huahine et la petite Maupiti. Alors, où se placent-elles les unes par rapport aux autres ? D’est en ouest, on trouve Huahine, ensuite Taha’a et Raiatea dans le même lagon, ensuite Bora Bora et Maupiti. Celles-ci sont des îles hautes entourées d’un lagon. Mais ça ne s’arrête pas là, on trouve aussi dans les Îles sous le Vent 4 atolls ! Au nord de Bora Bora, il y a l’atoll Tupai, très photogénique vu du ciel car presque en forme de cœur. Puis, à l’ouest de Maupiti, assez éloignés, les atolls de Maupihaa (aussi appelé Mopelia), Motu One (aussi appelé Bellingshausen) et Manuae (aussi appelé Scilly). |
Mouillage du motu Tautau pour un snorkeling à la dérive
L’un des mouillages les plus réputés de Taha’a se trouve près du motu Tautau à l’ouest, pour son « jardin de corail » assez éblouissant, selon les guides. Une bonne occasion de profiter de la faune et de la flore sous-marine locale, pour la redécouvrir encore et encore !
Trois motu s’enchaînent sur le récif du nord au sud (enfin quatre si on compte la petite touffe de cocotiers en plus). On jette l’ancre en face du motu Motuea, dans 3-4 m de fond. On se retrouve bien loin de la côte de Taha’a, mais ce n’est pas le but de nous rendre à terre de toute façon.
On est bien tranquille dans ce mouillage, si on s’écarte un peu des charters. Car ils commencent à se faire nombreux dans les parages même si la fin de la saison sûre est proche. Pas vraiment de stop dans ces tours organisés au final, on croisera des catamarans de location pendant toute la saison des pluies. Mais en pleine haute saison, le coin doit vite devenir infernal !
Quelle jolie vue en tout cas sur Bora Bora depuis le mouillage, on n’arrêtera pas de la mitrailler ! Elle nous appelle presque au loin. Tant de rumeurs, de mythes, de louanges à son sujet, ça donne envie. Ou pas, car selon beaucoup de plaisanciers, elle serait surfaite, trop touristique et n’en vaudrait même pas la peine ! On se fera notre propre avis quelques jours plus tard…
On saute tous dans l’annexe pour rejoindre le motu du milieu, le motu Maharare. Celui-là ne semble pas privé. Des locaux font un barbecue sur l’un des côtés de la petite île. Eh oui, c’est le week-end, les Polynésiens adore se retrouver en famille sur les plages, barbecue, bronzette, baignade, pas de stress quoi !
De l’autre côté du motu, on se retrouve rapidement en compagnie de nombreux touristes fraîchement débarqués de bateaux d’excursion. Ce spot de snorkeling, dans le chenal entre le motu Maharare et le motu Tautau, est victime de son succès. Les tours se succèdent les uns à la suite des autres !
On comprend vite pourquoi ce spot est si prisé et à vrai dire, c’est pour une bonne raison. Le courant s’accélère dans le petit chenal, au-dessus de grosses et belles patates de corail foisonnant de vie. Il suffit de remonter à pied, de se mettre à l’eau et de se laisser glisser dans le courant en ouvrant juste les yeux, pas besoin de palmer ! Une véritable attraction !
On empreinte à pied le petit sentier qui longe la rive sud du motu Maharare, jusqu’au vaste platier qui continue après vers la barrière de corail. Mise à l’eau rapide, il faut se dépêcher d’enfiler son masque et ses palmes car le courant fort nous embarque aussitôt.
Et là, c’est comme un jeu, on se laisse flotter les uns derrières les autres dans cet aquarium spectaculaire. On se croirait en train de voler ! L’écran sous-marin naturel qui défile est de toute beauté. Malgré le nombre important de passages par ici, les coraux et les poissons sont variés et bien présents.
La sensation nous rappelle Fakarava, où proche de la passe sud, le courant s’accélérait dans le lagon pour nous faire voler de la sorte au-dessus des coraux et des poissons.
Bien sûr, on peut recommencer autant de fois qu’on veut, c’est l’avantage de pouvoir remonter à pied, sans effort. On peut alors tenter de changer de couloir de glisse. Car on ne peut pas passer partout, seulement dans des sortes de veines plus profondes entre les patates.
Note : Attention d’ailleurs à ne pas se retrouver coincé dans trop peu de profondeur au-dessus des coraux. Le courant est fort, il peut être difficile de revenir en arrière. C’est là où les palmes sont utiles, jouant le rôle de gouvernail.
Le spot n’est-il pas devenu trop touristique ?
Mentionné de toute part sur les guides et dépliants qui parlent de Taha’a, il est vrai qu’on n’est pas seuls sur les lieux. Même en cette fin de haute saison, il faut parfois jouer de patience avec les autres touristes dans l’eau. Les nouveaux-venus ne sont pas à l’aise, flottant sur des bouées ou des frites. Là, tout de suite, ça donne des airs de parc aquatique… Allez, on aime bien critiquer, même si au final, des touristes, on en est aussi !:)
Mais pour mes parents, ce ne sera même pas gênant, préférant s’attarder sur les richesses sous-marines (et ils ont bien raison). Damien et moi, on le remarque surtout car nous venons depuis peu des Tuamotu, où 10 personnes là-bas paraissent déjà une foule !
La question se pose, quel sera notre dernier mouillage sur Taha’a ?
Le temps se gâte sur la petite île, tout comme sur sa voisine Raiatea. Jusque là, nous avions eu de la chance ces derniers jours avec un soleil radieux. Mais les nuages s’installent et c’est sous un ciel plus que morose que nous levons l’ancre.
Pour notre dernier stop ici, on tente une approche d’abord dans la baie de Tapuamu, en face du motu Tautau. Elle s’avère trop profonde pour s’y ancrer sereinement, comme toutes les baies autour de l’île de toute manière. L’unique corps-mort restant en plein milieu est pris.
On continue dans la baie de Hurepiti au sud-ouest. On s’enfonce à l’intérieur, un peu dubitatifs, car les accès pour débarquer à terre semblent raress. Tous les pontons paraissent privés. Quelques bouées sont disponibles au fond de la baie, mais elles appartiennent en fait à un guide d’excursion. Le corps-mort est gratuit si on réserve un tour avec lui, pour aller les plantations de vanille. Intéressant mais cher, surtout nous n’avons pas le temps de la faire.
Troisième tentative, la bonne ? Direction la baie d’Apu au sud. Cette grande baie comprend cette fois-ci une vingtaine de bouées. On repère bien celles réservées aux charters, le nom de la compagnie de location est marqué dessus. D’autres bouées sont marquées « Champon », installées par la ferme perlière du même nom. Comme nous comptons aller la visiter ensuite et que le corps-mort est gratuit, on s’amarre donc sur l’un d’entre eux.
Note : On reviendra plusieurs fois dans cette baie, prenant à chaque fois une bouée différente (en évitant juste celles marquées « Dream Yacht Charter »). On ne se fera jamais embêtés, même en restant plusieurs jours.
On débarque en annexe, enfin on tente de trouver un ponton car les coraux le long du rivage empêchent quasi tout passage. Une fois à terre, on est rapidement déçu. La baie d’Apu n’a pas grand-chose à proposer, peut-être que la météo grisâtre ne nous motive pas vraiment non plus.
On visite alors la ferme perlière Champon, au bout de la pointe. Une employée nous explique (de nouveau) la fabrication des perles noires de Tahiti. Au moins, on aura plus d’informations sur la classification des perles (voir notre article «Fakarava, l’atoll des Tuamotu aux milles promesses« ). Par contre, les tarifs des bijoux dans la boutique sont juste exorbitants !
L’avantage de la baie d’Apu, c’est surtout sa position. Elle est bien protégée du vent, notamment des alizés ou du mara’amu.
Lors de nos passages suivants par ici, on ira faire du snorkeling sur le tombant près de la rive, mêlant jolis coraux et poissons tropicaux. Le paddle reste également une activité toujours agréable et calme (quand il n’y a pas de vent). Par exemple, pour faire le tour du motu Toapuhi qui trône au milieu de la baie !
Taha’a, c’est désormais terminé pour le moment, nous basculons sur Raiatea juste en face. Allons-nous revenir ici dans un futur proche, si nous repassons dans les Îles sous le Vent ?
Ce qu’il nous reste à faire sur Taha’a
Pour le moment, nous n’avons pas été particulièrement séduit par cette petite île. Mis à part le joli snorkeling amusant à l’ouest, on n’a pas encore profité de l’intérieur des terres, prometteur il paraît. Mais en voilier, ce n’est pas l’île la plus accueillante, avec ses immenses baies bien trop profondes pour s’y ancrer et ses bouées souvent réservées aux catamarans de location.
On ne sent pas forcément bienvenue du coup, mais c’est peut-être juste un ressenti. Voici en tout cas ce qu’il nous resterait à faire :
- Une randonnée à pied sur la route traversière de Haamene au sud jusqu’à Patio au nord. Comme c’est normalement un aller simple, il faudrait se renseigner si l’aller retour est possible sur la journée, au risque de devoir prévoir un véhicule à une extrémité ou pouvoir faire du stop.
- Une « excursion vanille » à travers l’île avec un guide, pour découvrir les plantations locales et de la célèbre gousse. Nous avons déjà appris les mystères de sa culture sur Nuku Hiva aux Marquises, mais celle de Taha’a reste très célèbre.
- Une visite de la distillerie de rhum Pari Pari qui fait des produits locaux et naturels, dans la baie de Tapuamu. A voir si la bouée sur place peut être disponible.