On vous a parlé récemment de la côte est puis de Papeete. Zoom maintenant sur la côte ouest de la grande île de Tahiti. Plutôt les côtes ouest, sud et sud-ouest géographiquement mais « côte ouest », c’est l’appellation couramment utilisée dans les guides touristiques pour englober toute cette partie du littoral.
Nous partons en vadrouille toujours depuis le mouillage de la marina Taina, où nous nous occupons également de la vente de notre voilier. Pour cela, nous avons la chance de pouvoir utiliser la voiture d’un couple d’amis, prêtée pour un mois. Un vrai coup de chance pour découvrir tous les attraits de la côte.
Randonnée sur les hauteurs de Punaauia
Un petit tour en pleine nature, c’est toujours agréable pour s’aérer l’esprit. C’est d’ailleurs la première fois que nous pourrons aller randonner sur Tahiti. Sans voiture, nous n’aurions jamais pu effectuer cette balade conseillée par un ami de Damien vivant sur l’île.
Direction Punaauia, et plus précisément le lotissement Miri, côté montagne, pas très loin au sud de la marina Taina. Il faut prendre la route principale qui traverse le lotissement et s’enfoncer dans la vallée jusqu’à l’extrémité de la zone pavillonnaire. Un court voyage en voiture au pays des luxueuses villas de l’île, toutes ceinturées de hautes barrières, agrémentées d’un joli jardin avec piscine. Pas de doute, nous ne sommes pas dans les quartiers pauvres par ici.
Tout au bout du lotissement, on commence à voir apparaître un ou deux petits panneaux sur le bord de la route qui précisent qu’un chemin de randonnée se trouve effectivement juste après. Nous nous garons sur un parking en terre, d’où part deux sentiers. Tout en suivant l’application Maps.me et les conseils de l’ami de Damien, nous optons pour celui de gauche, qui grimpe tout droit pour rejoindre un chemin plus large au-dessus de nous.
Les maisons et villas en contrebas disparaissent rapidement derrière les arbres, nous voilà seuls. C’est parti pour deux heures de marche (apparemment) ! Pas plus de précision que cela, nous savons juste que nous devrions atteindre une antenne en hauteur.
La promenade débute dans une jolie forêt de pins, la pente est douce, sans difficulté. Les aiguilles de pins amortissent nos pas, l’ambiance calme et silencieuse. A chaque tournant, les trouées entre les arbres laissent entrevoir le décor derrière nous. Difficile de ne pas s’arrêter à chaque fois pour mitrailler la vue qui se dévoile ainsi vers l’ouest, sur le lagon et sur Moorea posée sur l’horizon ! Pas exactement la même que celle du belvédère de Pirae, mais tout aussi ravissante et même encore plus nature (car nous n’avons pas la ville de Papeete ni ses installations portuaires qui s’étalent devant nous).
Nous sortons de la forêt pour marcher désormais sur un étroit sentier de terre battue, humide suite aux dernières pluies (n’oublions pas que c’est la saison, nous sommes déjà chanceux d’avoir un magnifique ciel au-dessus de nos têtes). Dans le sens de la montée, pas de souci, en revanche, il sera bien glissant lorsque nous redescendrons. Aucune envie de me retrouver sur les fesses dans la terre, il faudra marcher avec précaution.
Nous continuons notre petit périple, les tournants s’enchaînent. Ça monte doucement certes, mais ça monte quand même, et surtout, le temps passe sans que je ne vois où ce chemin nous mène. Je commence à avoir mal aux jambes : deux heures de marche, vraiment ? Encore, si ce n’est que l’aller, ça va, car la descente est toujours plus rapide. Mais l’aller en question semble très loin d’être terminé et nous les avons dépassé, ces deux heures de marche !
Nous continuons malgré tout, Damien refuse de renoncer maintenant. Je peine et je peste un peu derrière lui, tellement peu habituée à faire fonctionner mes quadriceps. Damien, lui, a beaucoup plus d’endurance et de toute manière, n’est pas du tout du genre à se plaindre. Au contraire, son unique but est d’arriver jusqu’à cette fameuse antenne comme prévu, il n’y a pas à tergiverser.
Au détour d’une falaise, nous tombons enfin sur une vision qui nous dépayse : vers le cœur même de l’île de Tahiti. Alors, certes, les nuages qui semblent installés en permanence ici nous bouchent un peu la vue, mais peu importe. Nous sommes émus d’admirer enfin la nature flamboyante aux abords du centre de l’île. Tahiti est immense, nous ne sommes encore que sur son pourtour, bien loin de son réel centre et de ses hautes montagnes. Mais la végétation vierge, dense, impénétrable même, qui s’étale sous nos pieds donne un bel aperçu du caractère préservé de l’île une fois qu’on quitte le littoral. Impossible d’imaginer un homme fouler le sol de ces pentes abruptes, verdoyantes et sauvages. Finalement, même les nuages gris qui s’étirent et bougent en volutes de fumée apportent une touche mystérieuse et solennelle à l’endroit.
Le chemin continue, nous distinguons une énorme antenne parabolique légèrement en contrebas. Ce n’est pas encore celle indiquant la fin de la randonnée, mais je décide de m’arrêter là, j’en ai assez de monter pour la journée. Damien, encore plein d’énergie, termine la marche d’un pas rapide et prend quelques photos tout en haut, histoire que je vois quand même ce que j’ai manqué, faute d’endurance !
Une fois Damien revenu, il est temps de redescendre tous les deux jusqu’à la voiture. Trois heures et trente minutes pour l’aller environ, deux heures de descente. On est loin des deux petites heures annoncées au début… Mais dès que l’effort est passé, comme très souvent, on se rappellera que cette balade était finalement très charmante.
Le musée de Tahiti et ses îles
Un stop incontournable d’après de nombreux guides ! Il se situe à Punaauia, sur la pointe des Pêcheurs. Malheureusement, il est en travaux et ils ne sont pas prêts d’être terminés. Nous nous y rendons quand même, il reste une salle ouverte avec une collection permanente. Il pleut de toute façon, parfait timing pour nous rendre au musée, non ?
L’entrée est payante, 600 francs par personne, cela revient presque cher étant donné le circuit relativement court à l’intérieur. L’exposition est intéressante bien que brève, on y trouve un exemple des pièces les plus emblématiques des différents archipels de Polynésie française. Armes en bois, pirogues, casques, bijoux, outils : plongeon dans l’histoire des anciens polynésiens !
Marae Arahurahu
Un peu plus loin sur la route, nous partons avec nos amis du voilier Quasar, Yann & Laura, visiter un marae, c’est-à-dire un vestige archéologique de la culture ma’ohi. Ce n’est pas notre premier, loin de là, nous en avions déjà admiré plusieurs avec curiosité aux Marquises. Visiter, c’est un bien grand mot, comme il s’agit en général d’une grande plateforme de pierre, on se contente de marcher autour et d’imaginer la vie que pouvaient avoir le peuple ancestral des îles.
Yann et Laura ont entendu parler d’une cascade à dénicher plus loin, dans la forêt. Aussitôt dit, nous empruntons le minuscule sentier qui démarre du fond du parc. Nous voilà crapahutant au sein de la végétation tropicale, traversant plusieurs fois le même petit torrent. C’est celui qu’il faudrait suivre et remonter pour atteindre la fameuse cascade, seulement, nous finissons par être bloqués par la nature avant d’en apercevoir le bout. Les branches, les plantes, les lianes, l’environnement devient vite impénétrable et aucun de nous n’a envie de continuer à pied, directement dans le lit de la rivière.
Maraa : visite rapide des grottes et kitesurf sur le lagon
L’attrait de Maraa au coin sud-ouest de la grande île, ce sont ses grottes qui s’enchaînent dans la falaise le long de la route. Nous nous arrêtons brièvement en voiture, curieux d’aller voir de nos propres yeux ces profondes cavités dans la roche.
Le stop est bref, ça c’est sûr, le parcours est en effet plutôt court. La première grotte, Ana-vai-poiri, qui signifie « la grotte aux eaux sombres », est très impressionnante. Un véritable trou béant et obscur à même la falaise. On n’en voit pas le fond, la voûte nous empêche de distinguer les profondeurs du lieu. Elle mesure tout de même 80 m de long ! Aucune envie de partir nager dedans et de s’enfoncer dans cette obscurité mystérieuse. Il est même dit que sa faible hauteur sous la roche laisse croire que plus on s’avance dans l’eau, plus le fond semble s’éloigner et devenir inaccessible.
De toute manière, officiellement, la baignade est interdite. Il y a même une corde qui interdit le passage aux abords de la grotte, laissant les visiteurs sur le sentier avec une vue d’ensemble. Pourtant, trois Tahitiens sont en train de se savonner dans l’eau douce et fraîche ! A la vue de tous (OK, il n’y a personne dans les parages mais bon) et pas avec des savons très naturels… On s’éloigne rapidement pour aller admirer la seconde grotte, et retrouver un peu de magie dans ce lieu.
Les deux autres grottes s’avèrent moins grandes et moins profondes mais tout aussi spectaculaires, dissimulées dans la végétation ambiante. Les lianes et fougères dégringolent en cascades le long de la falaise. Ici, plus de baigneurs, seuls des minuscules oiseaux – des hirondelles grises de Tahiti – vont et viennent entre leurs cachettes dans le noir et l’extérieur.
Note : Tous les lieux décrit dans ce post sont gratuits ! (Excepté le musée de Tahiti et ses îles.) Cela nous a vraiment surpris, nous ne nous y attendions pas. Le marae Arahurahu, ces grottes de Maraa, le jardin d’eau et le jardin botanique décrits ci-dessous, tout est libre d’accès. Aucune raison de ne pas faire un stop dans chacun d’entre eux quand on se balade autour de l’île en voiture.
Nous sommes revenus dans la baie de Maraa, cette fois-ci en voilier, quelques semaines plus tard. La passe pour rentrer dans le lagon est facile à prendre, quasiment par toutes les conditions extérieures – à éviter peut-être par très forte houle de SO. Nous avons jeté l’ancre à l’est de la passe, dans une dizaine de mètres de profondeur, pas très loin du plateau qui remonte vers la barrière de corail.
L’emplacement est calme, peu de voilier s’aventurent ainsi sur la côte sud de Tahiti Nui. Le décor est magnifique, avec ces immenses montagnes vertes qui plongent dans la mer, où la nature semble recouvrir chaque centimètre carré jusqu’aux sommets des volcans. Rien à voir avec le paysage de la côte ouest tahitienne : le relief y descend plus en pente douce et surtout, les habitations ont poussé sur les pentes, recouvrant une belle partie de la montagne. Ici, l’image de l’île vierge fait son retour, on prend beaucoup plus de plaisir à rester de longues minutes assis, juste à contempler ce superbe panorama.
Note : On vous en dit plus sur le spot de kitesurf de Maraa dans notre post «Le kitesurf dans les Îles de la Société, quand on voyage en voilier ».
Jardin d’eau de Vaipahi
Nous garons la voiture sur le bas-côté de la route et traversons côté montagne pour rejoindre le kiosque marquant l’entrée, un fare vendant des produits locaux. Juste derrière, un croisement : d’un côté, une grande boucle, qui grimpe dans les hauteurs et s’enfonce dans la jungle. De l’autre, un petit parcours sans dénivelé, qui traversent des jardins. Cette fois-ci, nous avons la femme de partir en randonnée, le sentier autour des bassins qui jalonnent la route sera amplement suffisant🙂
Nous entrons dans un parc bercé par les légendes locales, cerné par l’esprit des eaux des ruisseaux, des cascades et des sources environnantes. Le site était autrefois utilisé pour des rites religieux liés au passage vers l’au-delà, afin de purifier et de faire renaître l’âme des défunts.
A travers le jardin, on suit ainsi le parcours de ces âmes, au fil des points d’eau. Le long du sentier, différents panneaux nous expliquent le rituel et toutes les étapes qui mènent à ce repos éternel, jusqu’au Rohotu-No’ano’a, le paradis des Ma’ohi.
Jardin botanique de Paperai, sur le motu Ovini
Avant Taravao, la ville construite sur l’isthme qui lie la grande île – Tahiti Nui – et la presqu’île – Tahiti Iti –, il reste encore un lieu à visiter : le jardin botanique d’Harrison Smith.
C’est qui celui-là ? Un Américain, passionné de botanique et plus particulièrement de la flore tropicale. Il a accompli un tour du monde durant lequel il découvrit l’île de Tahiti, en 1903. Il tomba amoureux de cette île perdue au milieu de l’océan Pacifique et reviendra s’y installer en 1919. Il se consacra alors à parfaire sa collection, agrandissant au fur et à mesure son domaine. Il a fait venir des plantes des quatre coins du monde et en a ramené tout autant lors de ses voyages : il aurait ainsi introduit plus de 250 espèces végétales, le plus souvent considérées comme utiles à la population. Le fameux (et excellent) pamplemousse des Marquises provient par exemple de ses importations !
Malheureusement, ses choix ne furent pas toujours justes. C’est lui qui a également introduit certaines espèces invasives, dont notamment le miconia en 1937, une plante plutôt jolie en apparence, avec ses feuilles vertes et mauves, mais qui depuis étouffe les forêts des îles et fait mourir les autres plantes locales.
Vous connaissez tout désormais de Tahiti Nui, la grande île ! (Pour la presqu’île – Tahiti Iti –, ce sera dans un futur article !). Côte est, Papeete, côte ouest, nous avons bien eu le temps et la possibilité de profiter de ce qu’elle a à offrir. Il nous reste beaucoup de choses à voir, énormément de randonnées et de vallées à découvrir, mais nous n’aurons sans doute ni le temps ni le courage de tout faire. Maintenant, retour prévu à Moorea, pour un tour de l’île à la fois en voilier et en voiture, afin de la connaître elle-aussi le plus possible !
Encore un magnifique reportage merci beaucoup !!!